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Le Document du Mouvement Humaniste a été écrit par [Silo] et il est inclu dans son livre [Lettre à mes Amis], plue éxactement dans la sixième lettre, écrite le 5 avril 1993. Ici de suite le texte intégral.
Le Document du Mouvement Humaniste a été écrit par [[Silo]] et il est inclu dans son livre [[Lettre à mes Amis]], plue éxactement dans la sixième lettre, écrite le 5 avril 1993. Ici de suite le texte intégral.


'''Document du Mouvement Humaniste'''
'''Document du Mouvement Humaniste'''

Version du 23 octobre 2017 à 09:26

Le Document du Mouvement Humaniste a été écrit par Silo et il est inclu dans son livre Lettre à mes Amis, plue éxactement dans la sixième lettre, écrite le 5 avril 1993. Ici de suite le texte intégral.

Document du Mouvement Humaniste

Les humanistes sont des femmes et des hommes de ce siècle, de notre époque. Ils reconnaissent les antécédents de l’humanisme historique et s’inspirent des apports des différentes cultures, et pas seulement de celles qui occupent actuellement une place centrale. De plus, ces hommes et ces femmes laissent derrière eux ce siècle et ce millénaire pour se projeter vers un monde nouveau.

Les humanistes sentent que leur histoire est très longue et que leur futur l’est bien plus encore. Ils pensent à l’avenir en luttant pour surmonter la crise générale d’aujourd’hui. Ils sont optimistes et croient à la liberté et au progrès social.

Les humanistes sont internationalistes et aspirent à une nation humaine universelle. Ils comprennent de façon globale le monde dans lequel ils vivent, et agissent sur leur milieu immédiat. Ils aspirent à un monde non pas uniforme mais multiple : multiple par ses ethnies, ses langues et ses coutumes ; multiple par ses localités, régions et provinces autonomes ; multiple par ses idées et ses aspirations ; multiple par les croyances, l’athéisme et la religiosité ; multiple dans le travail ; multiple dans la créativité.

Les humanistes ne veulent pas de maîtres ; ils ne veulent ni dirigeants ni chefs, et ne se sentent ni représentants ni chefs de quiconque. Les humanistes ne veulent pas d’un État centralisé ni d’un para-État le remplaçant. Les humanistes ne veulent pas d’armée qui joue le rôle de police, ni de bandes armées qui s’y substituent.

Mais entre les aspirations humanistes et les réalités du monde d’aujourd’hui, un mur s’est dressé. Il est temps de l’abattre. Pour cela, l’union de tous les humanistes du monde est nécessaire.

Le capital mondial

Voici la grande vérité universelle : l’argent est tout. L’argent est gouvernement, il est loi, il est pouvoir. Il est, fondamentalement, subsistance. Mais en plus, il est l’art, il est la philosophie et il est la religion. Rien ne se fait sans argent ; on ne peut rien sans argent. Il n’y a pas de relations personnelles sans argent. Il n’y a pas d’intimité sans argent et même le choix de la solitude dépend de l’argent.

Mais la relation à cette « vérité universelle » est contradictoire. La majorité des gens ne veulent pas de cet état de fait. Ainsi, nous sommes face à la tyrannie de l’argent. Une tyrannie qui n’est pas abstraite car elle a un nom, des représentants, des exécutants et des procédés indubitables. Aujourd’hui, il ne s’agit pas d’économies féodales, ni d’industries nationales, ni même d’intérêts de groupements multinationaux. Aujourd’hui il s’agit, pour ces survivants historiques, d’adapter leurs avoirs aux impératifs du capital financier international, ce capital spéculateur qui se concentre à l’échelle mondiale. Même l’État national a besoin de crédits et d’emprunts pour survivre. Tous mendient l’investissement et fournissent des garanties pour que la banque assume les décisions finales. Le temps approche où les entreprises elles-mêmes ainsi que les campagnes et les villes deviendront la propriété incontestable de la banque. De même, le temps du para-État arrivera, où l’ancien ordre sera anéanti.

Parallèlement, l’ancienne solidarité disparaît. En définitive, il s’agit de la désintégration du tissu social et de l’apparition de la déconnexion de millions d’êtres humains, indifférents entre eux, malgré la pénurie générale. Le grand capital étend son pouvoir non seulement sur l’objectivité, par le contrôle des moyens de production, mais aussi sur la subjectivité par le contrôle des moyens de communication et d’information. Dans ces conditions, le grand capital peut disposer à son gré des ressources matérielles et sociales, dégradant irrémédiablement la nature et écartant progressivement l’être humain. Pour cela, il dispose de technologies suffisantes. Et, de même qu’il a vidé de sens les entreprises et les États, il vide aussi de sens la science en la transformant en technologie produisant la misère, la destruction et le chômage.

Les humanistes n’ont pas besoin de beaucoup d’arguments pour étayer le fait qu’aujourd’hui le monde dispose de conditions technologiques suffisantes pour résoudre, en peu de temps, les problèmes touchant de vastes régions, à savoir : le plein emploi, l’alimentation, la santé, le logement et l’instruction. Si rien n’est fait dans ce sens, c’est tout simplement que la spéculation monstrueuse du grand capital l’en empêche.

Le grand capital, ayant épuisé l’étape de l’économie de marché, commence à imposer sa discipline à la société pour affronter le chaos qu’il a lui même a produit. Devant une telle irrationalité, ce ne sont pas les voix de la raison qui se lèvent dialectiquement mais plutôt les plus obscurs racismes, fondamentalismes et fanatismes. Et si ce néo-irrationalisme en arrive à diriger des régions et des collectivités, la marge d’action des forces progressistes s’amenuisera de jour en jour. Par ailleurs, des millions de travailleurs ont déjà pris conscience aussi bien des irréalités du centralisme étatique que de l’hypocrisie de la démocratie capitaliste. Ainsi, les ouvriers se dressent contre leurs dirigeants syndicaux corrompus, tout comme les peuples remettent en question leurs partis politiques et leurs gouvernements. Mais il faut donner une orientation à ces phénomènes qui, sinon, s’enliseront dans des actions spontanées et sans aucune continuité. Il faut débattre au sein du peuple des thèmes fondamentaux concernant les facteurs de production.

Pour les humanistes, les facteurs de la production sont le travail et le capital. La spéculation et l’usure sont de trop. Dans la situation actuelle, les humanistes luttent pour que la relation absurde qui a existé entre ces deux facteurs soit totalement transformée. Jusqu’à présent, on a imposé que le profit revienne au capital et le salaire au travailleur, justifiant un tel déséquilibre par le “risque” assumé par l’investissement... comme si chaque travailleur n’engageait pas son présent et son avenir dans les va-et-vient du chômage et de la crise ! De plus, la gestion et le pouvoir de décision à l’intérieur de l’entreprise sont également en jeu. Le profit non destiné au réinvestissement dans l’entreprise, à son expansion ou à sa diversification, dérive vers la spéculation financière. Le profit qui ne crée pas de nouvelles sources d’emploi, dérive aussi vers la spéculation financière. Par conséquent, les travailleurs doivent orienter leur lutte pour obliger le capital à un rendement productif maximum. Mais ceci ne pourra se réaliser sans le partage de la gestion et de la direction. Comment éviter autrement les licenciements massifs, la fermeture des entreprises et le vide qui en résulte ? Car le préjudice majeur réside dans le sous-investissement, la faillite frauduleuse, l’endettement forcé et la fuite des capitaux et non dans les bénéfices résultant de l’augmentation de la productivité.. Et si on insistait pour que les travailleurs confisquent les moyens de production suivant les enseignements du XIXe siècle, il faudrait alors tenir compte du récent échec du socialisme réel.

Quant à l’objection qui dit qu’encadrer le capital, comme est encadré le travail, produit sa fuite vers des lieux et des zones plus profitables, on peut répondre : ceci ne se produira plus très longtemps puisque l’irrationalité du schéma actuel mène ce capital à sa saturation et à la crise mondiale. Cette objection, que nous reconnaissons d’une immoralité radicale, méconnaît le processus historique du transfert du capital vers la banque. Par le biais de ce transfert, le chef d’entreprise devient lui-même un employé sans pouvoir de décision, à l’intérieur d’un circuit dont l’autonomie n’est qu’apparente. Par ailleurs, au fur et à mesure que la récession s’accentuera, les chefs d’entreprises commenceront eux aussi à prendre en considération ces différents éléments. Les humanistes ressentent la nécessité d’agir non seulement dans le domaine du travail, mais aussi dans le domaine politique pour empêcher que l’État ne soit un instrument du capital financier mondial, pour obtenir que la relation entre les facteurs de production soit juste, et pour rendre à la société l’autonomie qui lui a été arrachée.

Démocratie formelle et démocratie réelle

L’édifice de la démocratie s’est gravement délabré avec l’effondrement de ses principaux fondements: indépendance entre les pouvoirs, représentativité et respect des minorités. L’indépendance théorique entre les pouvoirs est un contresens. Il suffit de rechercher dans la pratique l’origine et la composition de chacun d’eux pour démontrer les relations intimes qui les unissent. Il ne pourrait en être autrement. Tous font partie d’un même système. De la sorte, les crises fréquentes (empiétement des pouvoirs, superposition de fonctions, corruption et irrégularités) correspondent à la situation globale, économique et politique d’un pays donné.

À propos de la représentativité, depuis l’époque de l’extension du suffrage universel, on pensait qu’il n’existait qu’un seul acte entre l’élection et la fin du mandat des représentants du peuple. Mais à mesure que le temps passait, on a vu clairement qu’il existe un premier acte, par lequel un grand nombre élit un petit nombre, et un deuxième acte, par lequel ce petit nombre trahit le grand nombre en représentant des intérêts étrangers au mandat reçu. Déjà, ce mal couve dans les partis politiques réduits à des coupoles de dirigeants coupées des besoins du peuple. Déjà, dans la machinerie des partis, les grands intérêts financent les candidats et leur dictent la politique à suivre. Tout ceci met en évidence une crise profonde dans le concept et la mise en pratique de la représentativité.

Les humanistes luttent pour transformer cette pratique en donnant une plus grande importance à la consultation populaire, au plébiscite et à l’élection directe des candidats. Dans de nombreux pays, il existe encore des lois qui assujettissent les candidats indépendants à des partis politiques ; de même, il existe des subterfuges et des contraintes financières qui les empêchent de se présenter devant la société. Toute Constitution ou loi qui s’oppose à la pleine capacité du citoyen d’élire et d’être élu, se moque des fondements mêmes de la démocratie réelle qui est au-dessus de toute règle juridique. Et si l’on parle d’égalité des chances, les médias doivent se mettre au service de la population lors de la période électorale pendant laquelle les candidats exposent leurs propositions, en accordant à tous exactement les mêmes chances. Par ailleurs, on doit imposer des lois de responsabilité politique par lesquelles, celui qui ne respecte pas les promesses faites à ses électeurs, risque la révocation, la destitution ou le jugement politique. Car l’expédient, pratiqué actuellement, par lequel les individus ou partis qui ne tiennent pas leurs engagements sont sanctionnés par les urnes lors du prochain scrutin, n’interrompt en rien le deuxième acte de trahison des personnes représentées. Il existe de plus en plus de moyens technologiques pour mettre en œuvre la consultation directe sur les sujets d’urgence. Il n’est pas question de privilégier les sondages ni les enquêtes manipulées mais de faciliter la participation et le vote direct grâce aux moyens électroniques et informatiques de pointe.

Dans une démocratie réelle, on doit donner aux minorités les garanties que mérite leur représentativité, mais on doit également favoriser toute mesure qui facilite, dans la pratique, leur insertion et leur développement. Aujourd’hui, les minorités harcelées par la xénophobie et la discrimination demandent anxieusement à être reconnues et, dans ce sens, il est de la responsabilité des humanistes d’élever cette question au niveau des discussions les plus importantes, en érigeant partout la lutte jusqu’à vaincre les néo-fascismes avoués ou dissimulés. En définitive, lutter pour les droits des minorités, c’est lutter pour les droits de tous les êtres humains. Mais il arrive aussi que dans l’ensemble d’un pays, des provinces entières, des régions ou des provinces autonomes subissent la même discrimination par la contrainte qu’exerce l’État centralisé, aujourd’hui instrument impuissant dans les mains du grand capital. Ceci devra cesser par la mise en place d’une organisation fédérative dans laquelle le pouvoir politique réel reviendra aux mains des dites entités historiques et culturelles.

En définitive, mettre en avant les thèmes du capital et du travail, les thèmes de la démocratie réelle et les objectifs de la décentralisation de l’appareil étatique, c’est acheminer la lutte politique vers la création d’un nouveau type de société. Une société flexible et en changement constant, en accord avec les nécessités dynamiques des peuples, aujourd’hui asphyxiés par la dépendance.

La position humaniste

L’action des humanistes ne s’inspire pas de théories fantaisistes sur Dieu, la nature, la société ou l’histoire. Elle s’inspire des nécessités vitales qui consistent à éloigner la douleur et à s’approcher du plaisir. Mais, à ces nécessités, la vie humaine ajoute la prévision du futur en se fondant sur l’expérience passée et sur l’intention d’améliorer la situation présente. Son expérience n’est pas le simple produit de sélections ou d’accumulations naturelles et physiologiques comme c’est le cas pour toutes les autres espèces ; elle est aussi expérience sociale et expérience personnelle lancées pour dépasser la douleur actuelle et l’éviter dans l’avenir. Son travail, accumulé au travers des productions sociales, se transmet et se transforme de génération en génération, dans une lutte continue pour améliorer les conditions naturelles, y compris celles de son propre corps. C’est pourquoi, on doit définir l’être humain comme un être historique, ayant un mode d’action sociale capable de transformer le monde et sa propre nature. Et chaque fois qu’un individu ou un groupe humain s’impose à d’autres par la violence, il parvient à arrêter l’histoire transformant ses victimes en objets “naturels”. La nature n’ayant pas d’intentions, lorsque l’on nie la liberté et les intentions des autres, on les transforme en objets naturels, en objets d’utilisation.

Le progrès de l’humanité, en lente ascension, requiert la transformation de la nature et de la société, en éliminant la violente appropriation animale de certains êtres humains par d’autres. Quand cela arrivera, on passera de la préhistoire à une histoire pleinement humaine. En attendant, on ne peut pas partir d’une valeur centrale autre que l’être humain, entier dans ses réalisations et dans sa liberté. C’est pourquoi les humanistes proclament : « Rien au-dessus de l’être humain et aucun être humain en dessous d’un autre ». Si on pose comme valeur centrale Dieu, l’État, l’argent ou toute autre entité, on subordonne l’être humain en créant des conditions pour le contrôler et le sacrifier ultérieurement. Pour les humanistes, ce point est évident. Les humanistes sont athées ou croyants, mais ne partent pas de leur athéisme ou de leur foi pour fonder leur vision du monde et leur action. Ils partent de l’être humain et de ses nécessités immédiates. Et si dans leur lutte pour un monde meilleur, ils croient découvrir une intention qui fait avancer l’histoire dans une direction de progrès, ils mettent cette foi ou cette découverte au service de l’être humain.

Les humanistes posent le problème de fond : savoir si l’on veut vivre, et décider dans quelles conditions.

Toutes les formes de violence, physique, économique, raciale, religieuse, sexuelle et idéologique par lesquelles le progrès humain a été entravé, répugnent aux humanistes. Toute forme de discrimination, manifeste ou larvée, constitue pour les humanistes un motif de dénonciation. Les humanistes ne sont pas violents mais, par dessus tout, ils ne sont pas lâches et ne craignent pas d’affronter la violence car leur action a un sens. Les humanistes relient leur vie personnelle et leur vie sociale. Ils ne posent pas de fausses antinomies, et en cela réside leur cohérence.

Ainsi la ligne de séparation entre l’humanisme et l’anti-humanisme est tracée. L’humanisme met en avant la question du travail face au grand capital ; la question de la démocratie réelle face à la démocratie formelle; la question de la décentralisation face à la centralisation; la question de l’anti-discrimination face à la discrimination; la question de la liberté face à l’oppression; la question du sens de la vie face à la résignation, à la complicité et à l’absurde.

Parce que l’humanisme se fonde sur la liberté de choix, il possède la seule éthique valable aujourd’hui. De même, parce qu’il croit à l’intention et la liberté, il fait la distinction entre erreur et mauvaise foi, entre celui qui se trompe et le traître.

De l’humanisme naïf à l’humanisme conscient

C’est à la base sociale, dans les lieux de travail et d’habitation des travailleurs, que l’humanisme doit transformer la simple protestation en force consciente, orientée vers la transformation des structures économiques.

Quant aux membres combatifs des organisations syndicales et aux membres des partis politiques progressistes, leur lutte deviendra cohérente quand ils tendront à transformer les instances dirigeantes des organisations dont ils font partie, en donnant à leurs collectivités une orientation qui mettra à la première place, avant même les revendications à caractère immédiat, les questions de fond que propose l’humanisme.

Un très grand nombre d’étudiants et d’enseignants, habituellement sensibles à l’injustice, rendront plus consciente leur volonté de changement dans la mesure où la crise générale du système les touchera. Et bien sûr, les gens de la presse, en contact avec la tragédie quotidienne, sont en mesure aujourd’hui d’agir dans une direction humaniste, de même qu’un certain nombre d’intellectuels dont la production se veut en contradiction avec les règles que fait valoir ce système inhumain. Nombreuses sont les positions qui, partant de la réalité de la souffrance humaine, invitent à une action désintéressée en faveur des démunis ou des discriminés. Parfois, des associations, des groupes volontaires et des couches importantes de la population se mobilisent et apportent ainsi une contribution positive. Assurément, une part de cette contribution consiste à dénoncer ces problèmes ; mais ces groupes ne fondent pas leur action sur la transformation des structures responsables de ces maux. Ces positions s’inscrivent davantage dans l’humanitarisme que dans l’humanisme conscient. Cependant, elles contiennent des protestations et des actions ponctuelles susceptibles d’être approfondies et étendues.

Le champ anti-humaniste

A mesure que les forces mobilisées par le grand capital asphyxient les peuples, des positions incohérentes surgissent et se renforcent en exploitant cette souffrance, en la canalisant vers de faux coupables. A la base de ces néo-fascismes se trouve une profonde négation des valeurs humaines. De même, dans certains courants écologistes déviés, la nature passe avant l’homme. Ils ne prêchent plus que le désastre écologique est catastrophique parce qu’il met en danger l’humanité, mais parce que l’être humain a attenté à la nature. Selon certains de ces courants, l’être humain est pollué et par là même, il contamine la nature. Il serait préférable pour eux que la médecine n’eut pas connu de succès dans le combat contre les maladies et dans l’allongement de la durée de la vie. « La Terre d’abord ! » crient-ils avec hystérie, nous rappelant les proclamations du nazisme. De là à discriminer des cultures qui contaminent, des étrangers qui salissent et qui polluent, il n’y a qu’un petit pas. Ces courants s’inscrivent aussi dans l’anti-humanisme car au fond ils méprisent l’être humain. Leurs mentors se méprisent eux-mêmes en reflétant les tendances nihilistes et suicidaires à la mode.

Une partie importante de gens réceptifs adhèrent aussi à l’écologisme car ils comprennent la gravité du problème que celui-ci dénonce. Mais si cet écologisme prend le caractère humaniste qui lui correspond, il orientera la lutte contre les promoteurs de la catastrophe, à savoir : le grand capital et la chaîne d’industries et entreprises destructrices, parents proches du complexe militaro-industriel. Avant de se préoccuper des phoques, cet écologisme devra s’occuper de la faim, de la concentration urbaine, de la mortalité infantile, des maladies, du déficit sanitaire et du manque de logement, existant dans de nombreuses parties du monde. Et il mettra l’accent sur le chômage, l’exploitation, le racisme, la discrimination et l’intolérance dans ce monde technologiquement avancé. Un monde qui, d’autre part, est en train de créer des déséquilibres écologiques au nom de sa croissance irrationnelle.

Il n’est pas nécessaire de trop s’étendre sur des considérations concernant les droites, instruments politiques de l’anti-humanisme. Leur mauvaise foi atteint de tels niveaux que, périodiquement, elles se proclament comme représentantes de “l’humanisme”. Dans le même esprit, la ruse cléricale, qui a prétendu théoriser sur la base d’un ridicule “humanisme théocentrique” (?), n’a pas manqué de se produire. Ces gens qui ont inventé les guerres de religions et les inquisitions, ces gens qui ont été les bourreaux des pères historiques de l’humanisme occidental se sont appropriés les vertus de leurs victimes, allant même jusqu’à “pardonner les déviations” de ces humanistes de l’histoire. La mauvaise foi et le banditisme dans l’appropriation des mots sont énormes au point que les représentants de l’anti-humanisme ont tenté de se parer du nom “d’humanistes”. Il serait impossible de dresser l’inventaire des moyens, des instruments, des formes et expressions dont dispose l’anti-humanisme. En tous cas, jeter la lumière sur ses tendances les plus sournoises contribuera à ce que de nombreux humanistes, spontanés ou naïfs, révisent leurs conceptions et le sens de leur pratique sociale.

Les fronts d’action humanistes

L’humanisme organise des fronts d’action dans les domaines du travail, du logement, des syndicats, de la politique et de la culture avec l’intention de devenir un mouvement social. En procédant ainsi, il crée les conditions pour l’insertion des différents groupes, individus et forces progressistes sans que ceux-ci ne perdent leur identité ou leurs caractéristiques propres.

L’objectif de ce mouvement consiste à promouvoir l’union des forces capables d’exercer une influence croissante sur de vastes couches de la population, orientant par son action la transformation sociale.

Les humanistes ne sont pas naïfs et ne se gargarisent pas de déclarations propres aux époques romantiques. Dans ce sens, ils ne considèrent pas leurs propositions comme l’expression la plus avancée de la conscience sociale et ne pensent pas non plus à leur organisation en termes indiscutables. Les humanistes ne feignent pas d’être les représentants des majorités. En tous cas, ils agissent en accord avec ce qui leur paraît le plus juste, visant les transformations qu’ils croient les plus appropriées et les plus réalisables dans l’époque qu’ils vivent.